Ravalement de façade
Je vous ai déjà raconté les réveils en fanfare le dimanche matin lorsqu’une bande
de moustachus tente de démolir mon immeuble avec alternativement des marteaux
de vitrier et des pics pneumatiques, sous le prétexte fallacieux de ravaler la
façade.
Oui, je sais, Ils ont débuté il y a quatre
mois, mais on s’habitue à leur présence rassurante. Et puis c’est toujours
amusant le soir en rentrant de donner un coup latte dans leur échafaudage
bancal pour en voir choir un ou deux. Jusqu’à présent et par je ne sais quel
miracle, nous n’avons à déplorer que trois tétraplégies et deux amputations.
En ce moment, ils balancent du cinquième étage
des pavetons de 12 kg qu’ils décrochent à la barre à mine des balcons. Comme
Sir Isaac nous apprend que plus ça tombe de moins haut, moins ça va plus vite
et réciproquement, je ne sors plus sans mon casque de moto.
Quand on voit ce qu’ils arrachent des murs, on se dit que soit le bâtiment était vraiment en mauvais état, soit que nous sommes tombés sur un équipe über zélée d’adeptes d’une secte shivaïte hard-core.
Le moustachu est frappeur ! A force de
taper partout, ils ont réussi à me bousiller la clim de salon qui fuit
maintenant des litres de condensat sur le canapé quand je la mets en marche, et
desceller le réservoir de la chasse d’eau des toilettes de droite (je vous ai
déjà dit que j’ai deux toilettes dans un appart de 40 m2?). Tout ça
depuis l’extérieur. Fortiche, non ?
Si vous êtes des lecteurs assidus, vous vous souvenez probablement comment ils avaient descellé la grille de la fenêtre de la cuisine. Et bien ce matin était venu le temps de re-sceller la grille de la fenêtre de la cuisine.
Arrive donc vers 9 heures trois pieds nickelés
avec une grosse masse, des clous divers et variés (traduisez pas deux clous
identiques) et un poste à souder.
L’histoire se passe presque de commentaires.
Les images devraient se suffire à elles mêmes.
Après avoir fait sauter les plombs trois fois pour de vagues histoires de charge électrique, ils ont branché les câbles préalablement tortillonnés du poste à souder artisanal (400 ampères) à la place du chauffe-eau dans la salle d’eau. Un grand sceau de dal fry à qui trouvera le fil de terre.
Ensuite, un moustachu équilibriste a entrepris de braser la grille aux clous précédemment rentrés en force dans les jointures des briques, accroupi sur le rebord de la fenêtre (j’habite au deuxième étage) pendant que ses copains faisaient levier avec un morceau de bois, à la fois dans la cuisine et depuis l’extérieur, probablement pour s’assurer de l’orthogonalité de l’ouvrage.
Oui, parce que ces valeureux ravaleurs ont démonté leurs charpentes de bambou AVANT de remettre les grilles aux fenêtres. Où est le challenge sans ça ?
Tadaaaa ! Et voila le travail.
Moi je dis, Bravo, oui, Bravo ! Pourquoi
se faire ch… avec un niveau à bulle, des chevilles, des rondelles et des
tire-fonds ?
Note pour plus tard. Ne plus passer sous la fenêtre de la cuisine. Je nourris quelques doutes
sur la pérennité d’une si belle entreprise.
J’adore ce pays.
PS : On m’a donné à manger aujourd’hui une sucrerie de luxe indienne qui avait un goût très prononcé de mousse à raser mâtinée de canard WC. Surprenant ! Un peu moins que le gâteau au chocolat saveur « colle néoprène » de la pâtisserie American Express de Hill Road, mais surprenant quand même. Il faut toujours avoir un mouchoir dans la poche pour cracher discrètement sans offenser son hôte les découvertes gastronomiques de ce pays formidable.