Mon sujet favori
Régulièrement, je vais faire prendre soins de ma moustache par les autorités compétentes, à savoir le premier merlan qui a des ciseaux qui coupent, un peigne sans poux, des lames neuves, de l’alcool à 90 et un blaireau pas trop sale.
Comme les soirées sont longues à Guwahati (le soleil se couche à 17h et il y a une sorte de couvre-feu tacite en raison des attentats), je suis allé me faire dépoiler la couenne en face de mon hôtel à 150 roupies la nuit sans eau chaude.
Et puis pendant que j’y étais, et que je n’avais rien d’autre à faire, j’ai dit banco et j’ai demandé le traitement total de la partie de mon anatomie se trouvant au dessus des épaules. Soins du visage et massage de la tête. Ca porte la facture à 1 euro 10, mais soyons fous.
Après m’être fait copieusement enduire
d’une couche épaisse de crème Nivia
(version indienne du produit de Beiersdorf) façon ravalement
de façade, j’ai vu surgir d’on ne sait où
un vibromasseur pour hippopodame format poêle à frire
pour un plaisir accru des parties charnues de ce
cétongulé aquatique. Une fois les fils
torsadés fichés dans le 220, on est en droit d'avoir
un certain doute sur le choix du traitement. La
pénétration totale de l’onguent s’est
faite à l’aide de l’engin susnommé, en
faisant sauter au passage 3 plombages à chaque passage sur
les maxillaires et en mettant dans le désordre tous mes
tissus mous. Puis j’ai vu apparaître dans mon champ de
vision latéral deux paluches velues qui avaient pour mission
de remettre dans le bon ordre tous mes tissus mous à la
force du poignet, avec moult lotions, topiques et
décoctions. Je peux vous dire que j’en ai eu pour mon
argent. D’autant que Dame Nature dans un élan
d’ingratitude aveugle m’a doté d’une
implantation capillaire plutôt chiche si bien que mon front
s’arrête approximativement au milieu de mon
crâne, ce qui fait donc plus de surface à masser. (En
anglais on dit 'an elegant receding hairline')
Et pour finir, un giclette de Old spice, pour les vrais moustachus, à base d’éther, d’acide fluorhydrique et d’extraits de vieux piments, d’où le nom. Ca pique un peu, et il ne faut pas ouvrir les yeux pendant 3 minutes sous peine de cécité permanente. Mais c’est à ce prix là qu’on distingue l’enfant de l’adulte dans ce pays. Celui qui supporte l’Old Spice sans pleurer, c’est lui l’homme. Accessoirement, ça débouche les sinus, et les éviers. J’ai maintenant la peau lisse et douce comme les fesses d’un bébé, sans le moindre résidu squameux ou peaux mortes.
2) Massage de la tête
Comment dire ? Le premier mot qui me vient à l’esprit c’est… viril. Les frictions énergiques, combinées aux vapeurs de l’Old Spice ont achevées les cheveux qu’il me restait. On a assisté en direct à une catastrophe écologique, une déforestation sans précédent, puisque 30 cm2 de la couverture déjà mince du sommet de ma tête sont restés dans les doigts de Mr Moustache.
C’est dans une situation comme ça qu’on réalise que la nature est bien faite. Il a eu beau essayer, il n’a pas réussi à me décoller le derme de la lame basale. Et toc ! La peau est irrémédiablement accrochée aux bas morceaux sous-jacents.
N’empêche que, une fois que les yeux retrouvent le chemin des orbites, et que le petit vertige déclanché par les chocs répété de l’encéphale contre la dure-mère s’estompe, on se sent bien.
J’adore ce pays.